Lolicon

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Lolicon (ロリコン, Rorikon?), parfois romanisé Rorikon ou Lolikon est un terme wasei-eigo (mot formé au Japon à partir de l'anglais) reprenant la contraction de Lolita Complex (de Lolita, le roman de Vladimir Nabokov), un terme qui désigne l'attirance pour les jeunes adolescentes qui n'ont pas encore achevé leur puberté (les lolitas), voire l'attirance pour les fillettes qui ne l'ont pas encore atteinte.

Définition[modifier | modifier le code]

« Lolita Complex » (ロリータ・コンプレックス, rorīta konpurekkusu?) a pour abréviation « lolicon » plutôt que « lolicom » à cause de la prononciation du japonais. D'autres mots étrangers avec des syllabes finissant en m sont transcrits de la même manière. La transcription du mot dans l'alphabet latin est « rorikon ».

En son sens japonais originel, « lolicon » n'est pas directement lié aux productions artistiques. « Loli » caractérise toute représentation de jeunes filles ou de fillettes, aussi bien photographique (« loli photobooks ») que dessinée ou filmée.

« Lolicon » désigne plus spécialement ailleurs qu'au Japon des productions artistiques (mangas, anime, jeux vidéoetc.) érotiques ou pornographiques mettant en scène des personnes de sexe féminin d'un jeune âge (autour de 7 ans) jusqu'à 17 ans.

Histoire[modifier | modifier le code]

Origines[modifier | modifier le code]

Lolicon est une référence au livre Lolita de Vladimir Nabokov dans lequel un homme adulte devient obsédé sexuellement par une fille de douze ans[1]. Le terme « Lolita complex » a d'abord été utilisé au début des années 1970 avec la traduction de The Lolita Complex de Russell Trainer (en) et a pu être entré dans la nomenclature japonaise à ce moment-là[2]. Shinji Wada a utilisé ce nom pour son œuvre de 1974 Stumbling upon a Cabbage Field (キャベツ畑でつまずいて, Kyabetsu-batake de Tsumazuite?), une parodie manga d'Alice au pays des merveilles[3]. Le raccourcissement du terme « lolicon » est venu plus tard[2].

Succès du lolicon au Japon[modifier | modifier le code]

Deux facteurs combinés peuvent expliquer la prévalence notable des aspects juvéniles marqués dans l'art érotique japonais. D'abord le phénomène « kawaii », connu en Occident comme « tout ce qui est petit est mignon », est extrêmement populaire au Japon : on en voit la marque dans l'ensemble du style manga/anime. Ensuite, la culture du respect directement attachée à l'âge, qui considère les signes d'âge mûr comme synonyme de sagesse à vénérer. Cependant, il est devenu illégale en France. L'adulte étant en situation de pouvoir pour des raisons physiologiques, culturelles et sociales, il est présenté dans les productions de lolicon comme ayant un contrôle complet sur les actes sexuels qui pourrait y prendre place ; ce rôle initiatique serait un des pôles érotiques de ce genre de production. Par contre, dans la production habituelle, lorsqu'un personnage âgé — de préférence un sensei — a un comportement séducteur ou égrillard, c'est quasi systématiquement dans un contexte humoristique et caricatural décalé de « vieux salace » (Tortue Géniale dans Dragon Ball, Maître Ernestin (ou Happosaï) dans Ranma ½, Jiraya dans Narutoetc.).

Formes de représentation[modifier | modifier le code]

Le lolicon trouve son expression généralement dans des contenus réservés aux adultes, mais pas uniquement, un personnage pouvant être qualifié de lolicon dès l'instant qu'il représente un personnage de sexe féminin juvénile et situé dans un contexte sentimental. On peut citer certaines séries célèbres comme Love Hina où les personnages de Shinobu et Kaolla sont des lolicons. Le fan service est très souvent le facteur rendant un personnage lolicon, la subtilité étant souvent suffisamment fine pour marquer les amateurs de lolicon sans pour autant choquer le reste du public. Il n'est pas rare de retrouver un ou plusieurs lolicons dans la plupart des shōnens sentimentaux.

Mais c'est dans sa forme d'expression érotique et pornographique que le lolicon est le plus marquant. Le tout premier anime hentai produit au Japon était un lolicon[4], mais aujourd'hui, la production d'anime hentai lolicon est quasi nulle. Ses principales formes d'exploitations commerciales à ce jour sont les mangas, les jeux vidéo, ainsi que les loli-photobooks et DVD.

Mangas[modifier | modifier le code]

Les mangas pour adultes restent la forme d'expressions préférée des auteurs de lolicon et certains éditeurs se sont spécialisés dans ce type de publication. Avant de publier un manga, les auteurs passent très souvent par des publications réunissant plusieurs auteurs, Comic LO (Lolita Only) est une des plus célèbres qui paraît tous les mois aux éditions Akaneshinsha.

Jeux vidéo[modifier | modifier le code]

Les jeux vidéo lolicon se calquent sur ce qui se fait dans le hentai en général. Le type le plus répandu est celui des jeux de séduction où l'objectif est d'avoir un rapport sexuel avec le personnage féminin du jeu. Ces jeux se présentent le plus souvent sous la forme d'une histoire linéaire, les Visual novel dans lesquels il faut faire de temps à autre des choix ; il y a en général très peu d'animation dans ce type de jeu, les personnages apparaissant en images fixes sur des décors et les dialogues s'écrivant au fur et à mesure. Certains de ces jeux sont célèbres et ont été adaptés en séries anime grand public, c'est le cas par exemple pour Popotan.

Il existe d'autres types de jeux moins scénarisés et plus basés sur l'action, où les personnages sont en 3D et l'animation est très soignée.

Loli photobooks et DVD[modifier | modifier le code]

Les loli photobooks sont une forme d'exploitation commerciale du lolicon à mettre en marge car contrairement aux œuvres de l'esprit, ils impliquent de vrais mineurs. Leur contenu n'est pas pornographique (absence de nudité ou de rapports sexuels explicites) et leur publication est légale au Japon. Ces livres de photos mettent le plus souvent en valeur une jeune fille revêtue d'un uniforme, en maillot de bain ou sous-vêtements dans des positions suggestives.

Aspects juridiques[modifier | modifier le code]

Ceux-ci sont légaux au Japon tant qu'ils n'impliquent pas de vrais modèles dans le processus créatif[5] ; alors que dans la majorité des autres pays ils sont interdits (voir ci-dessous). En effet, le lolicon est fréquemment rapporté à la pédophilie. Ses défenseurs clament qu'un matériel fictionnel n'affecte pas les enfants, et que les lolicons peuvent aider à soulager la tension sexuelle des pédophiles ; ses opposants disent qu'au contraire la vision d'un tel matériel les encourage à considérer les enfants comme des objets sexuels, et que son autorisation risquerait de banaliser la pédopornographie non fictionnelle[6]. Cependant pour certains spécialistes ces accusations ne sont pas fondées[7], et au Japon, pays où est produite et consommée la grande majorité des lolicons, il n'est pas prouvé que cela ait pour conséquence une recrudescence des agressions envers les fillettes et les préadolescentes (dont la fréquence est là-bas en fait bien inférieure à la plupart des autres pays)[8]. Les lolicons sont un sujet fréquent d'étude universitaire sur la sexualité au Japon[9], et l'on suggère souvent qu'ils existent pour les mêmes raisons que les femmes habillées en uniforme de collégienne sont considérées attirantes. Au Japon, les mangas lolicons sont disponibles au feuilletage et à l'achat presque librement dans la plupart des librairies et des kiosques, la seule restriction étant qu'ils doivent, comme toutes les publications pour adultes, être placés à un endroit précis du magasin.

Les statistiques montrent une forte corrélation entre la grande vogue de matériel pornographique au Japon depuis les années 1970 et une baisse importante des agressions sexuelles, en particulier d'enfants et les cas de viol non-impulsif. Ceci appuie la théorie affirmant que la grande disponibilité de matériel sexuellement explicite diminue en fait le taux de crimes sexuels[10].

Le lolicon dans les législations nationales[modifier | modifier le code]

Le statut légal des dessins pornographiques représentant des mineurs (en), en particulier la pédopornographie virtuelle, varie d'un pays à l'autre.

La Cour suprême des États-Unis a décidé en 2002 que le « Child Pornography Prevention Act » de 1996, qui prohibait la pédopornographie virtuelle était inconstitutionnel[11] car il interdisait « des productions qui ne provoquent ni crimes ni victimes. La pédopornographie virtuelle n'est pas « intrinsèquement liée » à l'abus sexuel des enfants ». Le PROTECT Act de 2003 (Amber Alert Law)[12], promulgué par George W. Bush le , criminalise la pédopornographie virtuelle. En décembre 2005, Dwight Whorley fut condamné à ce sujet (mais il possédait aussi de la pédopornographie photographique)[13]. La Cour Suprême ne s'est pas encore prononcée sur cette loi.

L'Afrique du Sud a précisé en (« Films and Publications Amendment Bill ») qu'en pédopornographie la virtualité n'était pas un facteur de distinction avec la pédopornographie en général.

De même, l'article 163.1 du code criminel canadien interdit « toute représentation photographique, filmée, vidéo ou autre, réalisée ou non par des moyens mécaniques ou électroniques »[14]. Un Américain a été condamné à 30 jours de prison pour avoir fait passer du lolicon des États-Unis au Canada en [15].

En France, le fait, en vue de sa diffusion (dans tous les cas s'agissant de mineurs de quinze ans), de fixer, d'enregistrer ou de transmettre « l'image ou la représentation d'un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique » est interdite à la production et punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Le simple fait de consulter, d'acquérir ou de détenir une telle image est punie deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende[16]. L'ajout en 1998 dans cet article du terme représentation permet de condamner sans ambiguïté l'image d'un mineur en général, y compris une œuvre figurative d'imagination[17], non plus seulement l'image d'une personne mineure existante (par exemple un dessin fait d'après modèle réel). Des personnes ont été condamnées pour détention ou diffusion de lolicon, voir par exemple la jurisprudence du 12 septembre 2007 (pourvoi n° 06-86763[18]) (« l'objet du délit, qui, auparavant, était défini comme l'image d'un mineur, [...] est étendu à toute représentation d'un mineur ; qu'il peut donc s'agir d'images non réelles représentant un mineur imaginaire [...] », extrait de la jurisprudence).

En 1994 au Royaume-Uni, le Criminal Justice and Public Order Act introduisit une définition légale d'une « pseudo-photographie indécente d'un enfant », interdite tout comme les vraies. Cependant la loi n'inclut pas les productions artistiques où les reproductions ne tendent pas à une mimèsis parfaite, comme dans les mangas.

Aux Pays-Bas, le 1er octobre 2002, une loi caractérisant la « pédopornographie virtuelle » comme illégale fut introduite[19]. Cependant la loi ne concerne que les « représentations réalistes d'un mineur dans des positions sexuellement explicites[20] ».

En Allemagne, toute pornographie est interdite lorsqu'elle concerne « l'abus sexuel d'enfants, qu'il soit réel ou présenté de manière réaliste »[21].

Sujets liés[modifier | modifier le code]

Le toddlerkon (toddler signifiant « un tout-petit enfant » en anglais) ou bebīkon (ベビーコンプレックス, bebī konpurekkusu?, pour Baby complex) est un genre de lolicon qui implique des fillettes encore plus jeunes (moins de 6 ans) que celles des lolicons typiques.

Le shotacon met lui en scène des enfants et préadolescents de sexe masculin.

Le lolilezu (ロリレズ, rorirezu?), mot-valise pour lolicon no lezubian (ロリコンのレズビアン?), est une version lesbienne du lolicon, mettant en scène des femmes et des jeunes filles.

L'obacon, mot valise tirant son origine du mot obasan (おばさん) qui signifie une femme d'âge mûr et de la contraction du mot complexe, désigne quant à lui la préférence pour les femmes plus âgées. Terme utilisé dans le tome 3 de Cat's Eye par le personnage de Takéuchi.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Kinsella, 305.
  2. a et b Galbraith, Patrick W. (Foreword by Schodt, Frederik L. and Photography by Katsuhide, Asuki), The Otaku Encyclopedia: An Insider's guide to the subculture of Cool Japan, Tokyo, Japan, Kodansha International, (ISBN 978-4-7700-3101-3), p. 128–129
  3. Shinji Wada, "Kyabetsu-batake de Tsumazuite" in Bessatsu Margaret, June, 1974, p.121
  4. Lolita anime : Yuki no kurenai keshō ~ shōjo bara kei ~. Premier anime hentai, réalisé en 1984.
  5. Tim Richardson, « La pédopornographie interdite au Japon ». The Register,
  6. Bush signe le « Protect Act » : President's Remarks Upon Signing of S. 151, the Protect Act (30 avril 2003). Récupéré le 28 janvier 2006.
  7. The Early Window Liebert, R. M., Neale, J. M., & Davison, E. S. (ISBN 0-08-017091-9)
  8. Pornographie, viol et crimes sexuels au Japon International Journal of Law and Psychiatry 22(1) : 1-22. 1999.
  9. Sharon Kinsella, Adult Manga: Culture and Power in Contemporary Japanese Society. (ISBN 0-8248-2318-4)
  10. Pornography, Rape and Sex Crimes in Japan International Journal of Law and Psychiatry 22(1) : 1-22. 1999.
  11. Ashcroft v. Free Speech Coalition
  12. Bush signe le Protect Act
  13. Le premier homme à tomber sous le coup des nouvelles lois anti pédopornographie
  14. L'article 163.1
  15. CBC News, 4 avril 2006
  16. article 227-23 du Code pénal
  17. Lefranc 2008, p. 827
  18. Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 12 septembre 2007, no 06-86.763, Inédit
  19. Justitie (1er octobre 2002).
  20. Draft Convention on Cyber-crime (25 avril 2000).
  21. Section 184 (4) (à jour en avril 2006).

Annexes[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) « "Virtual Child" Pornography on the Internet: A "Virtual" Victim? », Duke Law & Technology Review,‎ (lire en ligne)
  • (en) « Does comic relief hurt kids ? », Japan Times,‎ (lire en ligne)