Nakba

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Graffiti sur un mur de Nazareth en Israël.

Le terme arabe « Nakba » (en arabe : نكبة) signifie « catastrophe » ou « désastre ».

De nos jours, dans le monde arabe, il désigne généralement l'exode palestinien de 1948, soit la fuite ou l'exil forcé de plusieurs centaines de milliers d'habitants de la Palestine mandataire pendant la guerre de 1948-1949 opposant Israël et les pays arabes voisins[1]. Cette acception du mot remonte à Constantin Zureik.

La Nakba a eu des effets politiques, culturels et psychologiques majeurs dans l'ensemble du monde arabe. Le mot « Nakba » est parfois aussi utilisé pour décrire ces effets. On parle alors de la « Nakba continuelle ».

Le souvenir de la Nakba joue un rôle important dans le monde arabe. Elle est commémorée chaque année le 15 mai, jour de la Nakba. Par ailleurs, le désir de venger la Nakba est souvent utilisé pour justifier la lutte armée contre Israël.

En Israël, l'utilisation du terme est interdite dans les manuels scolaires.

Acception antérieure du mot[modifier | modifier le code]

Avant la création de l'État d'Israël, le mot « nakba » a eu une autre signification. Constantin Zureik, intellectuel syrien qui a popularisé le terme dans son acception contemporaine, explique que nakba se référait communément à la bataille de Maysalun qui opposa, en 1920, l’armée française à la révolte arabe menée par Faysal (qui deviendra Faysal Ier, roi d’Irak)[2] et qui ouvrit la route de Damas aux troupes françaises.

Signification de « Nakba » pour Zureik[modifier | modifier le code]

Réfugiés palestiniens lors de l'exode de 1948.

En 1948, l'historien syrien grec orthodoxe Constantin Zureik publie à Beyrouth Ma’n al-nakba (La signification de la catastrophe). Pour lui, la Nakba est l’échec des armées arabes dans leur objectif d’empêcher la création d'Israël, afin d’éviter la partition du territoire palestinien (bien plus que le déplacement forcé des Palestiniens et l’impossible retour) ; la lutte contre Israël ne pourra être gagnée « tant que les Arabes restent figés dans leurs conditions actuelles. » Il écrit[3] :

« La défaite des Arabes en Palestine n’est pas une calamité passagère ni une simple crise, mais une catastrophe (Nakba) dans tous les sens du terme, la pire qui soit arrivée aux Arabes dans leur longue histoire pourtant riche en drames. »

Cette catastrophe n’affecte pas seulement la Palestine, mais promet des impacts importants sur l’ensemble du monde arabe. Il défend donc la consolidation du nationalisme arabe comme seul rempart possible, et estime que de profondes transformations sont ainsi nécessaires au sein de la société arabe pour espérer gagner la bataille contre Israël. Ses idées modernistes inspirées des mouvements intellectuels occidentaux, caractérisent le mouvement nationaliste arabe[2].

La « Nakba continuelle »[modifier | modifier le code]

En 2011, l’écrivain libanais Elias Khoury propose une relecture critique de l’ouvrage fondateur de Constantin Zureik[3] :

« Ce qu’il n’avait pas compris à l’époque, c’est que la Nakba n’est pas un événement mais un processus. Les confiscations de terres n’ont jamais cessé. Nous vivons toujours dans l’ère de la Nakba. »

Rôle du concept dans le monde arabe[modifier | modifier le code]

Commémoration[modifier | modifier le code]

Le « jour de la Nakba», une fillette à Hébron.

Le jour de la Nakba est une commémoration des événements de 1948 qui ont mené à la défaite arabe et au déplacement de la population palestinienne. Il est généralement célébré le 15 mai, le jour de l'indépendance d'Israël[1].

Justification de la lutte contre Israël[modifier | modifier le code]

Des dirigeants arabes autoritaires (Saddam Hussein, Hafez el-Assad, Mouammar Kadhafi), des mouvements islamistes[4] et les dirigeants de l'Iran[5],[6] font appel au désir de venger la Nakba pour justifier la lutte armée visant à éliminer Israël.

Rôle du concept en Israël[modifier | modifier le code]

Situation légale[modifier | modifier le code]

Selon Akram Belkaïd, « En Israël, la législation interdit l’usage du mot « Nakba » dans les manuels scolaires. La criminalisation de sa commémoration est régulièrement suggérée par des responsables politiques »[7].

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b « Nakba, l'exil palestinien ou "désastre" : épisode • 7 du podcast Israël-Palestine : les mots de la guerre », sur France Culture (consulté le )
  2. a et b Mathilde Rouxel, « Constantin Zureiq (1909-2000) », Les clés du Moyen-Orient,‎ (lire en ligne).
  3. a et b Benjamin Barthe, « La Nakba, « catastrophe » en arabe, un concept forgé il y a 70 ans », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  4. Jean-Pierre Filiu: Les Arabes, leur destin et le nôtre; 2015, La Découverte; 262 pages. Revue Défense Nationale, (1), 130-131.
  5. « Ahmadinejad : la "tumeur cancéreuse" d'Israël va bientôt disparaître », sur Le Point,
  6. « Le guide suprême iranien Ali Khamenei qualifie Israël de tumeur cancéreuse », sur rts.ch,
  7. « النكبة Al-Nakba », Le Monde diplomatique,‎ (lire en ligne, consulté le )

Article connexe[modifier | modifier le code]