Résistivité

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La résistivité d'un matériau, généralement symbolisée par la lettre grecque rho (ρ), représente sa capacité à s'opposer à la circulation du courant électrique. Elle correspond à la résistance[N 1] d'un tronçon de matériau d'un mètre de longueur et d'un mètre carré de section et est exprimée en ohms mètres (ou ohms-mètres), de symbole Ω m (ou Ω⋅m). On utilise aussi :

  • le Ω mm2/m = 10−6 Ω m ;
  • le μΩ cm = 10−8 Ω m.

L'évolution de la résistivité avec la température dépend du matériau :

Résistances.

Résistivité, résistance et conductance[modifier | modifier le code]

La résistance (en ohms) d'une pièce rectiligne de longueur (en mètres) et de section droite d'aire (en mètres carrés), faite d'un matériau de résistivité ρ (en ohms mètres), vaut : .

La résistivité est la grandeur inverse de la conductivité (symbole : σ) :

La résistance est la grandeur inverse de la conductance (symbole : ) : .

Mesure de la résistivité[modifier | modifier le code]

Résistivité d'une barre de matériau conducteur[modifier | modifier le code]

Pour une barre de matériau homogène de section constante et de longueur , la résistivité peut être retrouvée avec la loi de Pouillet : . La détermination de se fait :

  • soit par mesure directe (à l'aide d'un ohmmètre )  ;
  • soit par calcul, en faisant circuler un courant , puis en mesurant la tension . La loi d'Ohm permet alors de calculer soit  : .

Résistivité des sols[modifier | modifier le code]

On utilise un telluromètre[1] et la méthode de Wenner :

On plante quatre piquets alignés et équidistants notés 1, 2, 3 et 4. Le courant de mesure est injecté entre les piquets 1 et 4 et la résistance est mesurée entre 2 et 3. Si la distance entre deux piquets est , la résistivité du sol se calcule par la formule :

.

Résistivité des couches minces[modifier | modifier le code]

La méthode des quatre pointes de van der Pauw (en) est utilisable pour mesurer la résistivité d'une couche mince. Il faut placer les quatre pointes près des bords de la couche à caractériser.

Soit un rectangle dont les côtés sont numérotés de 1 à 4 en partant du bord supérieur, et en comptant dans le sens des aiguilles d'une montre. On injecte le courant entre deux points du bord 1 et on mesure la tension entre les deux points du bord opposé (bord 3). Le rectangle pouvant ne pas être strictement un carré, on effectue une deuxième mesure en injectant cette fois-ci le courant entre les deux points du bord 4, et comme précédemment on mesure ensuite la tension entre les deux points du bord opposé (bord 2). Il suffit ensuite de calculer, à l'aide de la loi d'Ohm, le rapport pour chaque configuration de mesures. On obtient ainsi et .

La résistivité est la solution de l'équation dite « équation de van der Pauw » (en) :

est l'épaisseur de la couche.

Une méthode de résolution consiste à calculer la résistance équivalente par la formule suivante :

,

étant le facteur de forme obtenu d’après la relation :

.

On calcule ensuite la résistivité par :

.

Calcul de la résistivité des cristaux[modifier | modifier le code]

Dans le cas d'un cristal parfait, la résistivité peut être calculée en fonction des paramètres fondamentaux[2].

Cristaux covalents[modifier | modifier le code]

Les cristaux covalents sont des isolants, la bande interdite est large. Avec l'élévation de température, des électrons peuvent être suffisamment excités pour franchir le gap. La conductivité suit donc une loi en

où :

Cristaux ioniques[modifier | modifier le code]

Dans les cristaux ioniques, la conduction se fait par migration de défauts. Le nombre et la mobilité des défauts suivent une loi d'Arrhenius, la conductivité suit donc une loi similaire, en

où :

Cristaux métalliques[modifier | modifier le code]

Dans le cas des cristaux métalliques, la résistivité augmente linéairement avec la température ; cela est dû à l'interaction entre les électrons et les phonons.

Le premier modèle utilisé considère que les électrons se comportent comme un gaz, le libre parcours moyen des électrons étant déterminé par les chocs avec les ions (atomes du réseau sans leurs électrons libres, réseau appelé « gellium »). On trouve une résistivité valant

avec :

  • m : masse d'un électron ;
  • N : nombre d'électrons par unité de volume, de l'ordre de 1028 m−3 ;
  • e : charge élémentaire ;
  • τ : temps de relaxation, c'est-à-dire durée moyenne séparant deux collisions.

Mais ce modèle ne prend pas en compte l'effet de la température ni des impuretés.

Selon la relation de Matthiessen, la conductivité comprend trois composantes :

ρ = ρT + ρi + ρD

avec :

  • ρT : contribution de l'agitation thermique ;
  • ρi : contribution des impuretés, de l'ordre du μΩ⋅cm/% d'impureté ;
  • ρD : contribution des défauts atomiques.

Le modèle de Drude prend en compte l'effet Joule, c'est-à-dire l'énergie cinétique que les électrons cèdent au réseau à chaque collision. Comme les autres modèles, c'est un modèle non quantique, qui permet également de prévoir la conductivité thermique, mais décrit mal ce qui se passe pour les températures très basses.

La résistivité d'un métal à une température proche de la température ambiante est en général donnée par :

ρ = ρ0(1 + α0 - θ0))

avec :

  • θ0 : température de référence (K) ou en (°C)
  • ρ0 : résistivité à la température θ0 (Ωm) ;
  • α0 : coefficient de température à la température θ0 (K−1) ;
  • θ : température (K) ou en (°C) mais doit être de la même unité que θ0.
Coefficient de température de quelques métaux pour θ0 = 20 °C[3]
Métal α (10−3K−1)
Argent 3,85
Cuivre 3,93
Aluminium 4,03
Plomb 4,2
Tungstène 4,5
Nickel 5,37
Fer 6,5

Attention α0 n'est valable qu'à la température θ0 : le véritable coefficient directeur de la caractéristique affine de la résistivité est ρ0α0. On peut voir que le coefficient α0 dépend lui même de la température de référence θ0 comme suit :

α0=1/(θ0 - θcarac )

avec :

θcarac : température caractéristique du métal considéré en (K) ou en (°C)

Ainsi pour le cuivre, θcarac= -234,5 °C ce qui donne pour θ0 = 20 °C, α0 = 1/254,5 = 3,93 × 10−3 K−1 ce qui correspond à la valeur donnée dans le tableau ci-dessus.

On pourrait ainsi, pour chaque métal, donner la valeur caractéristique θcarac qui correspond en fait à la température qui annule la résistivité du métal quand on extrapole sa caractéristique affine pour des températures en deçà de la plage de validité de l'approximation affine :

Température caractéristique de quelques métaux
Métal θcarac (°C) θcarac (K)
Argent −239,7 33,4
Cuivre −234,5 38,7
Aluminium −228,1 45,0
Plomb −218,1 55,1
Tungstène −202,2 70,9
Nickel −166,2 106,9
Fer −133,8 139,3

L'équation devient :

ρ = ρ0(1 + (θ - θ0) / 0 - θcarac ) ) = ρ0(θ - θcarac ) / (θ0 - θcarac )

Résistivités usuelles[modifier | modifier le code]

Métaux[modifier | modifier le code]

En général, la résistivité électrique des métaux augmente avec la température. Les interactions électrons-phonons peuvent jouer un rôle clé. Aux températures élevées, la résistance d'un métal augmente linéairement avec la température.

Métal Résistivité
à 20 °C
(Ω m)
Argent[4] 16 × 10−9
Cuivre[4] 17 × 10−9
Or[4] 22 × 10−9
Aluminium[4] 28 × 10−9
Magnésium[4] 43 × 10−9
Bronze 55 × 10−9
Zinc[4] 61 × 10−9
Laiton[4] 71 × 10−9
Cadmium[4] 76 × 10−9
Nickel[4] 87 × 10−9
Fer[4] 100 × 10−9
Platine[4] 111 × 10−9
Étain[4] 120 × 10−9
Plomb[4] 208 × 10−9
Constantan 500 × 10−9
Mercure[4] 941 × 10−9
Nichrome 1 000 × 10−9

Résistivité des métaux purs pour des températures entre 273 et 300 K (10-8 Ω⋅m)[5] :

H He
Li
9,55
Be
3,76
  B C N O F Ne
Na
4,93
Mg
4,51
Al
2,733
Si P S Cl Ar
K
7,47
Ca
3,45
  Sc
56,2
Ti
39
V
20,2
Cr
12,7
Mn
144
Fe
9,98
Co
5,6
Ni
7,2
Cu
1,725
Zn
6,06
Ga
13,6
Ge As Se Br Kr
Rb
13,3
Sr
13,5
  Y
59,6
Zr
43,3
Nb
15,2
Mo
5,52
Tc Ru
7,1
Rh
4,3
Pd
10,8
Ag
1,629
Cd
6,8
In
8
Sn
11,5
Sb
39
Te I Xe
Cs
21
Ba
34,3
*
Lu
58,2
Hf
34
Ta
13,5
W
5,44
Re
17,2
Os
8,1
Ir
4,7
Pt
10,8
Au
2,271
Hg
96,1
Tl
15
Pb
21,3
Bi
107
Po
40
At Rn
Fr Ra **
Lr Rf Db Sg Bh Hs Mt Ds Rg Cn Nh Fl Mc Lv Ts Og
   
  *
La
4,7
Ce Pr
70
Nd
64,3
Pm
75
Sm
94
Eu
90
Gd
131
Tb
115
Dy
92,6
Ho
81,4
Er
86
Tm
67,6
Yb
25
  **
Ac Th
14,7
Pa
17,7
U
28
Np Pu Am Cm Bk Cf Es Fm Md No

L'argent métallique est le corps pur simple qui est le meilleur conducteur d'électricité à température ambiante.

Conducteurs non métalliques[modifier | modifier le code]

Nom du matériau Résistivité à 20 °C
(Ω·m)
Carbone[4] 40 × 10−6

Isolants[modifier | modifier le code]

Nom du matériau Résistivité (Ω·m)
Eau pure[6] 1,8 × 105
Verre 1017
Air variable
Polystyrène 1020

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Dans cet article traitant du domaine de l'électricité, les termes utilisés « résistance », « conductivité » et « conductance » correspondent respectivement à « résistance électrique », « conductivité électrique » et « conductance électrique », ces termes étant plus usuels.

Références[modifier | modifier le code]

  1. On trouve aussi « tellurohmètre ».
  2. J. Philibert et al., Métallurgie, du minerai au matériau, Dunod, , 2e éd., p. 269.
  3. Y. Déplanche, Mémo formulaire, Casteilla, , p. 138, 245.
  4. a b c d e f g h i j k l m n et o Kurt Gieck, Formulaire technique (traduit en français par G. Bendit, École d'ingénieurs de Bienne - Suisse), Gieck-Verlag, Heilbronn (RFA), chap. Z1.
  5. (en) David R. Lide, CRC Handbook of Chemistry and Physics, CRC Press, , 90e éd., 2804 p., relié (ISBN 978-1-4200-9084-0).
  6. Si l'eau contient des impuretés, la résistivité décroit rapidement.

Articles connexes[modifier | modifier le code]